Mais tirez-moi le coeur de votre douce haleine ;
Non, ne le tirez pas, mais hors de chaque veine
Sucez-moi toute l’âme éparse entre vos bras ;
Non, ne la sucez pas ; car après le trépas
Que serais-je sinon une semblance vaine,
Sans corps, dessus la rive, où l’amour ne démène
(Pardonne-moi, Pluton) qu’en feintes ses ébats ?
Pendant que nous vivons, entr’aimons-nous, Marie,
Amour ne règne pas sur la troupe blêmie
Marie, à tous les coups vous me venez reprendre Que je suis trop léger, et me dites toujours, Quand je vous veux baiser, que j'aille à ma Cassandre, Et toujours m'appelez inconstant en amours.
Le vintieme d'Avril couché sur l'herbelette, Je vy, ce me sembloit, en dormant un chevreuil, Qui ça, puis là, marchoit où le menoit son vueil, Foulant les belles fleurs de mainte gambelette.
L'an se rajeunissait en sa verte jouvence Quand je m'épris de vous, ma Sinope cruelle ; Seize ans étaient la fleur de votre âge nouvelle, Et votre teint sentait encore son enfance.
Je vous envoye un bouquet que ma main Vient de trier de ces fleurs épanies, Qui ne les eust à ce vespre cuillies, Cheutes à terre elles fussent demain.
Je veus lire en trois jours l'Iliade d'Homere, Et pour-ce, Corydon, ferme bien l'huis sur moy. Si rien me vient troubler, je t'asseure ma foy Tu sentiras combien pesante est ma colere.
Je ne suis seulement amoureux de Marie, Anne me tient aussi dans les liens d'Amour, Ore l'une me plaît, ore l'autre à son tour : Ainsi Tibulle aimait Némésis, et Délie.
Ha ! que je porte et de haine et d'envie Au médecin qui vient soir et matin Sans nul propos tâtonner le tétin, Le sein, le ventre et les flancs de m'amie !
Chanson Douce Maîtresse, touche, Pour soulager mon mal, Ma bouche de ta bouche Plus rouge que coral ; Que mon col soit pressé De ton bras enlacé.
Comme on voit sur la branche au mois de may la rose, En sa belle jeunesse, en sa premiere fleur, Rendre le ciel jaloux de sa vive couleur, Quand l'Aube de ses pleurs au poinct du jour l'arrose ;