Poésie Paul Verlaine

Va ton chemin sans plus t'inquiéter ! La route est droite et tu n'as qu'à monter Portant d'ailleurs le seul trésor qui vaille Et l'arme unique au cas d'une bataille, La pauvreté d'esprit et Dieu pour toi.

  L'ennemi se déguise en l'Ennui Et me dit : " À quoi bon, pauvre dupe ? " Moi je passe et me moque de lui. L'ennemi se déguise en la Chair Et me dit : " Bah, retrousse une jupe ! Moi j'écarte le conseil amer.

Voix de l'Orgueil : un cri puissant comme d'un cor. Des étoiles de sang sur des cuirasses d'or, On trébuche à travers des chaleurs d'incendie… Mais en somme la voix s'en va, comme d'un cor.

Et j'ai revu l'enfant unique : il m'a semblé Que s'ouvrait dans mon coeur la dernière blessure, Celle dont la douleur plus exquise m'assure D'une mort désirable en un jour consolé.

Les chères mains qui furent miennes, Toutes petites, toutes belles, Après ces méprises mortelles Et toutes ces choses païennes,

On n'offense que Dieu qui seul pardonne. Mais On contriste son frère, on l'afflige, on le blesse, On fait gronder sa haine ou pleurer sa faiblesse, Et c'est un crime affreux qui va troubler la paix Des simples, et donner au monde sa pâture, Scandale, cœurs perdus, gros mots et rire épais.

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