Les Regrets

O combien est heureux qui n’est contraint de feindre,
Ce que la vérité le contraint de penser,
Et à qui le respect d’un qu’on n’ose offenser
Ne peut la liberté de sa plume contraindre!

Las, pourquoi de ce noeud sens-je la mienne éteindre,
Quand mes justes regrets je cuide commencer?
Et pourquoi ne se peut mon âme dispenser
De ne sentir son mal ou de s’en pouvoir plaindre?
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Si onques de pitié ton âme fut atteinte,
Voyant indignement ton ami tourmenté,
Et si onques tes yeux ont expérimenté
Les poignants aiguillons d’une douleur non feinte,

Vois la mienne en ces vers sans artifice peinte,
Comme sans artifice est ma simplicité:
Et si pour moi tu n’es à pleurer incité,
Ne te ris pour le moins des soupirs de ma plainte.
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Si par peine et sueur et par fidélité,
Par humble servitude et longue patience,
Employer corps et biens, esprit et conscience,
Et du tout mépriser sa propre utilité,

Si pour n’avoir jamais par importunité
Demandé bénéfice ou autre récompense,
On se doit enrichir, j’aurai (comme je pense)
Quelque bien à la fin, car je l’ai mérité.
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O marâtre nature (et marâtre es-tu bien,
De ne m’avoir plus sage ou plus heureux fait naître),
Pourquoi ne m’as-tu fait de moi-même le maître,
Pour suivre ma raison et vivre du tout mien?

Je vois les deux chemins, et ce mal, et de bien:
Je sais que la vertu m’appelle à la main dextre,
Et toutefois il faut que je tourne à senestre,
Pour suivre un traître espoir, qui m’a fait du tout sien.
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Si pour avoir passé sans crime sa jeunesse,
Si pour n’avoir d’usure enrichi sa maison,
Si pour n’avoir commis homicide ou traïson,
Si pour n’avoir usé de mauvaise finesse,

Si pour n’avoir jamais violé sa promesse,
On se doit réjouir en l’arrière-saison,
Je dois à l’avenir, si j’ai quelque raison,
D’un grand contentement consoler ma vieillesse.
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Je ne commis jamais fraude ni maléfice ,
Je ne doutai jamais des points de notre foi,
Je n’ai point violé l’ordonnance du roi,
Et n’ai point éprouvé la rigueur de justice:

J’ai fait à mon seigneur fidèlement service,
Je fais pour mes amis ce que je puis et doy,
Et crois que jusqu’ici nul ne se plaint de moi,
Que vers lui j’aye fait quelque mauvais office.
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C’est ores, mon Vineus, mon cher Vineus, c’est ore,
Que de tous les chétifs le plus chétif je suis,
Et que ce que j’étais, plus être je ne puis,
Ayant perdu mon temps, et ma jeunesse encore.

La pauvreté me suit, le souci me dévore,
Tristes me sont les jours, et plus tristes les nuits.
O que je suis comblé de regrets et d’ennuis!
Plût à Dieu que je fusse un Pasquin ou Marphore;
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N’étant de mes ennuis la fortune assouvie,
Afin que je devinsse à moi-même odieux,
M’ôta de mes amis celui que j’aimais mieux,
Et sans qui je n’avais de vivre nulle envie.

Donc l’éternelle nuit a ta clarté ravie,
Et je ne t’ai suivi parmi ces obscurs lieux!
Toi, qui m’as plus aimé que ta vie et tes yeux,
Toi, que j’ai plus aimé que mes yeux et ma vie.
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Un peu de mer tenait le grand Dulichien
D’Itaque séparé, l’Apennin porte-nue
Et les monts de Savoie à la tète chenue
Me tiennent loin de France au bord ausonien.

Fertile est mon séjour, stérile était le sien,
Je ne suis des plus fins, sa finesse est connue:
Les siens gardant son bien attendaient sa venue,
Mais nul en m’attendant ne me garde le mien.
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J’aime la liberté, et languis en service,
Je n’aime point la cour, et me faut courtiser,
Je n’aime la feintise, et me faut déguiser,
J’aime simplicité, et n’apprends que malice:

Je n’adore les biens, et sers à l’avarice,
Je n’aime les honneurs, et me les faut priser,
Je veux garder ma foi, et me la faut briser,
Je cherche la vertu, et ne trouve que vice:
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