H est coiffé d’un chapeau thessalien ; sa tunique grise est ceinte aux reins, ses
chaussures hautes sont nouées à la cheville par des courroies de cuir. 11 tient un bâton
blanc à la main ; sa démarche est rapide.
Salut, verger, maison, chambre où, filant la laine,
Pour moi fleurit la vierge à la divine haleine !
Pêcheur ( car tes paniers de jonc luisent couverts
D’une écume marine et de goémons verts ),
Tu ne l’ignores pas : cette maison est celle
Du vieil Hermas. Vit-il >
LE PÊCHEUR.
Il vit, mon fils, et scelle
Dans des vases de terre antique un vin récent.
HIPPIAS.
Les Dieux gardent la paix à son toit florissant !
Mais as-tu vu Daphné sa fille en ses demeures ?
Dis si sa vie est douce et si les jeunes Heures
Sur son front innocent passent d’un vol léger.
LE PÊCHEUR.
Les Dieux la rirent belle, ils l’aiment, étranger ;
Car la sainte pudeur la voile et la couronne.
Elle est heureuse.
HIPPIAS.
Ami, cette parole est bonne.
Ne peux-tu rien m’apprendre aussi de Kallista,
Sa mère ?
LE PÊCHEUR.
Elle gémit d’un Dieu qu’elle irrita….
Mais il n’est pas prudent que le pauvre révèle
A l’homme curieux une triste nouvelle.
Je dirai seulement qu’Apollon peut encor
Contre une tête impie armer ses flèches d’or.
Il s’en va.
HIPPIAS.
Oui, c’est Daphné, là-bas, étincelante et blanche !
Cueillant sur le sentier des herbes, elle penche
Sa taille et son beau col plus merveilleux à voir
Que leur image errante en mes yeux clos, le soir.
Je la vois, si longtemps désirée, et sa vue
Verse en mes yeux l’effroi d’une chose inconnue.
O Dieux qui me l’offrez à l’angle du chemin,
Vous avez mis sur elle un charme plus qu’humain !
Les Noces corinthiennes
Anatole France