Poésie Paul Eluard

poème amour
0
(…)
VII
Nous sommes à nous deux la première nuée
Dans l’étendue absurde du bonheur cruel
Nous sommes la fraîcheur future
La première nuit de repos
Qui s’ouvrira sur un visage et sur des yeux nouveaux et purs
Nul ne pourra les ignorer

 

Derniers poèmes d’amour

Paul Éluard

0

J’ai cru pouvoir briser la profondeur de l’immensité Par mon chagrin tout nu sans contact sans écho Je me suis étendu dans ma prison aux portes vierges Comme un mort raisonnable qui a su mourir Un mort non couronné sinon de son néant Je me suis étendu sur les vagues absurdes Du poison absorbé par…

0

Si je te parle c’est pour mieux t’entendre Si je t’entends je suis sûr de te comprendre Si tu souris c’est pour mieux m’envahir Si tu souris je vois le monde entier

0

Je t’aime pour toutes les femmes que je n’ai pas connues Je t’aime pour tous les temps où je n’ai pas vécu Pour l’odeur du grand large et l’odeur du pain chaud Pour la neige qui fond pour les premières fleurs Pour les animaux purs que l’homme n’effraie pas Je t’aime pour aimer Je t’aime…

0
Aurai-je un jour réponse à tout
Et réponse à personne

La vérité c’est que j’aimais
Et la vérité c’est que j’aime
De jour en jour l’amour me prend première
Pas de regrets j’ignore tout d’hier
Je ne ferai pas de progrès

Sur une autre bouche
Le temps me prendrait première

Je serai la première et la seule sans cesse
Il n’y a pas de drame il n’y a que mes yeux
Qu’un songe tient ouvert

Et je suis mon bonheur nocturne

Tout les mots sont d’accord

L’on m’aimera car j’aime par-dessus tout ordre
Et je suis prêt à tout pour l’avenir de tous
Et je ne connais rien à l’avenir
Mais j’aime pour aimer et je mourrai d’amour

À chanter les plages humaines
Pour toi la vivante que j’aime
Et pour tous ceux que nous aimons
Qui n’ont envie que de s’aimer
Je finirai bien par barrer la route
Au flot des rêves imposés
Je finirai par me retrouver
Nous prendrons possession du monde

Rien à haïr et rien à pardonner
Aucun destin n’illustre notre front
Dans l’orage notre faiblesse
Est l’aiguille la plus sensible
Et la raison de l’orage
Image ô contact parfait
L’espace est notre milieu
Et le temps notre horizon

Je rends compte du réel
Je prends garde à mes paroles
Je ne veux pas me tromper
Je veux savoir d’où je pars
Pour conserver tant d’espoir
Mes origines sont les larmes
Et la fatigue et la douleur
Et le moins de beauté
Et le moins de bonté

Et la femme que je protège
La femme dont j’assume
L’éternelle confiance

D’une main composée pour moi
Et qu’elle soit faible qu’importe
Cette main double la mienne
Pour tout lier tout délivrer
Pour m’endormir pour m’éveiller

D’un baiser la nuit des grands rapports humains
Un corps auprès d’un autre corps
La nuit des grands rapports terrestres
la nuit native de ta bouche
La nuit où rien ne se sépare

Que ma parole pèse sur la nuit qui passe
Et que s’ouvre toujours la porte par laquelle
Tu es entrée dans ce poème
Porte de ton sourire et porte de ton corps

Par toi je vais de la lumière à la lumière
De la chaleur à la chaleur
C’est par toi que je parle et tu restes au centre
De tout comme un soleil consentant au bonheur

Nous ne sommes seuls qu’ensemble
Nos amours se contredisent

Nous exigeons tout de rien
L’exception devient banale.

Nous deux toi toute nue
Moi tel que j’ai vécu
Toi la source du sang
Et moi les mains ouvertes
Comme des yeux

Nous deux nous ne vivons que pour être fidèles
À la vie

Entre les horizons volages
Qui font et défont sa beauté.
La forêt couvre ses épaules
Sa chevelure silencieuse
D’un seul bruit d’ailes d’un seul chant
Moisson d’espace

Ton ombre reprenait le chemin de ton corps

Je vois la ville de ton rêve
Que tu seras seule à peupler
Du tourbillon de ta beauté

Le paysage prolongeait
Nos paroles et nos gestes
L’allée s’en allait de nous
Les arbres nous grandissaient
Et nous calmions les rochers

Je suis avec toutes les bêtes
Pur m’oublier parmi les hommes

Nous avons eu huit ans nous avons eu quinze ans
Et nous avons vieilli noirci l’aube de la vie

Les hommes et les femmes que nous n’aimions pas
Nous n’y pensons jamais ils ne faisaient pas d’ombre

Mais nous avons vieilli le gouffre s’est peuplé
Nous avons reproduit un avenir d’adultes

La présence a pour moi les traits de ce que j’aime

C’est là tout mon secret ce que j’aime vivra

Entre moi toi et ma multitude
Puisque je suis à jamais ton miroir
Ma figurée
Les rues vont loin qui passent par nos villes
Loin dans les champs où l’on avance
Avec l’amour avec la vie avec le jour

Entre en moi toi toujours meilleure
Toujours semblable à mes désirs
Illimitée et torturée et rassurée

Captifs d’un seul moment un moment nous délivre
Le temps des amoureux qui passeront le pont
Que nous avons passé avant de nous connaître
Les flots de l’avenir les séparent encore
Mais leur lèvre a la courbe d’un seul mot je t’aime
Leurs mains sont la promesse d’une main doublée

Entre en moi toi ma paresseuse ma berceuse
Je n’ai pas de secrets pour toi
Avec toi je n’ignore rien
Tu es faite pour tout savoir
Je te dis tout au tableau noir
De mon passé de ma jeunesse

Je suis né comme une défaite

Je n’avais pour but que l’enfance

Le fait de commencer n’est qu’une illusion

Il fallait que je dise tout ce que j’ai dit
Car je viens de moins loin qu’où mes frères iront
Et je veux me survivre
Je veux mourir et vivre par un mot sans bornes
Ce premier mot c’est toi
Toi telle que tu es inaugurant mon ordre

Toi qui joins tout ce qui est vrai
Ma bien-aimée ma bien-aimante
Semblable aux saisons sans regrets
Toi qui me permets d’échapper
À la facilité de vivre
Par des mensonges même au nom de la vertu

Même au nom de la vérité

L’horizon borde mes paupières
Par quel miracle aurais-je peur

Il nous suffit d’être chacun pour être tous
D’être soi-même pour nous sentir nous

D’être sages pour être fous
Et d’être fous pour être sages

D’une caresse au seuil de notre nudité
L’univers s’impose subtil

Nous sommes l’un et l’autre au jour
Pour n’en jamais finir d’aimer

 

Poésie ininterrompue

Paul Éluard

0
On ne peut me connaître
Mieux que tu me connais

Tes yeux dans lesquels nous dormons
Tous les deux
Ont fait place à mes lumières d’hommes
Un sort meilleur qu’aux nuits du monde

Tes yeux dans lesquels je voyage
Ont donné aux gestes des routes
Un sens détaché de la terre

Dans tes yeux ceux qui nous révèlent

Lire la suite...

0
Je n’ai envie que de t’aimer
Un orage emplit la vallée
Un poisson la rivière

Je t’ai faite à la taille de ma solitude.

Le monde entier pour se cacher
Des jours des nuits pour se comprendre
Pour ne plus rien voir dans tes yeux
Que ce que je pense de toi
Et d’un monde à ton image
Et des jours et des nuits réglés par tes paupières.

 

Les yeux fertiles

Paul Éluard

Réalisation : www.redigeons.com - https://www.webmarketing-seo.fr/