Romans George Sand

Valentine

V

Valentine, après avoir remercié Bénédict par un salut gracieux, quitta la danse, et, se tournant vers la comtesse, elle comprit à sa pâleur, à la contraction de ses lèvres, à la sécheresse de son regard, qu’un orage couvait contre elle dans le cœur vindicatif de sa mère. M. de Lansac, qui se sentait responsable de la conduite de sa fiancée, voulut lui épargner les âcres reproches du premier moment, et, lui offrant son bras, il suivit avec elle, à une certaine distance, madame de Raimbault, qui entraînait sa belle-mère et se dirigeait vers le lieu où l’attendait sa calèche. Lire la suite...

VI

Tout à coup Valentine entendit un bruit sourd et prolongé semblable au roulement d’une voiture. Elle quitta le chemin, et se dirigea à travers un sentier vers le lieu d’où partait ce bruit, qui augmentait toujours, mais changeait de nature. Si Valentine eût pu percer le dôme de pommiers en fleurs où se glissaient les rayons de la lune, elle eût vu la ligne blanche et brillante de la rivière s’élançant dans une écluse à quelque distance. Cependant la fraîcheur croissante de l’atmosphère et une douce odeur de menthe lui révélèrent le rivage de l’Indre. Lire la suite...

VII

Bénédict se jette à bas de son cheval.

—Mademoiselle, s’écrie-t-il, je tombe à vos genoux. N’ayez pas peur de moi. Vous voyez bien qu’à pied je ne puis vous poursuivre. Daignez m’écouter un moment. Je ne suis qu’un sot; je vous ai fait une mortelle injure en m’imaginant que vous ne vouliez pas me comprendre; et comme en voulant vous préparer je ne ferais qu’accumuler sottise sur sottise, je vais droit au but. N’avez-vous pas entendu parler dernièrement d’une personne qui vous est chère ?

—Ah ! parlez, s’écria Valentine avec un cri parti du cœur. Lire la suite...

VIII

Valentine s’élança hors de la chambre. L’arrivée de M. de Lansac était pour elle un incident agréable; elle voulait lui faire prendre part à son bonheur; mais, à son grand déplaisir, Bénédict lui apprit qu’il l’avait dérouté en lui répondant qu’il n’avait pas entendu parler de mademoiselle de Raimbault depuis la fête. Bénédict s’excusa en disant qu’il ne savait pas quelles étaient les dispositions de M. de Lansac à l’égard de Louise. Mais au fond du cœur il avait éprouvé je ne sais quelle joie maligne à envoyer ce pauvre fiancé courir les champs au milieu Lire la suite...

X

En voyant paraître ce jeune homme dont elle se savait complice et qu’elle allait encourager, sous les yeux de sa grand’mère, à lui remettre un secret message, Valentine eut un remords. Elle sentit qu’elle rougissait, et le pourpre de ses joues alla se refléter sur celles de Bénédict.

—Ah ! c’est toi, mon garçon ! dit la marquise qui étalait sur le sofa sa jambe courte et replète avec des grâces du temps de Louis XV. Sois le bienvenu. Comment va-t-on à la ferme ? Et cette bonne mère Lhéry ? et cette jolie petite cousine ? et tout le monde ? Lire la suite...

XI

Elle ne put ouvrir la lettre de Louise que le soir. C’était une longue paraphrase du peu de mots qu’elles avaient pu échanger à leur gré dans l’entrevue de la ferme. Cette lettre toute palpitante de joie et d’espoir était l’expression d’une véritable amitié de femme romanesque, expansive, sœur de l’amour, amitié pleine d’adorables puérilités et de platoniques ardeurs.

Elle terminait par ces mots:

“Le hasard m’a fait découvrir que ta mère allait demain rendre une visite dans le voisinage. Lire la suite...

XII

À quelques jours de là, madame de Raimbault fut engagée par le préfet à une brillante réunion qui se préparait au chef-lieu du département. C’était à l’occasion du passage de madame la duchesse de Berry qui s’en allait ou qui revenait d’un de ses joyeux voyages; femme étourdie et gracieuse, qui avait réussi à se faire aimer malgré l’inclémence des temps, et qui longtemps se fit pardonner ses prodigalités par un sourire.

Madame de Raimbault devait être du petit nombre des dames choisies qui seraient présentées à la princesse, Lire la suite...

XIII

Elle avait trouvé moyen, la veille, de faire avertir Louise de sa visite; aussi toute la ferme était en joie et en ordre pour la recevoir. Athénaïs avait mis des fleurs nouvelles dans des vases de verre bleu. Bénédict avait taillé les arbres du jardin, ratissé les allées, réparé les bancs. Madame Lhéry avait confectionné elle-même la plus belle galette qui se fût vue de mémoire de ménagère. M. Lhéry avait fait sa barbe et tiré le meilleur de son vin. Ce furent des cris de joie et de surprise quand Valentine entra toute seule et sans bruit dans la salle. Elle embrassa comme Lire la suite...

XIV

Bénédict regardait d’abord l’image de Valentine avec calme; peu à peu une sensation pénible, plus prompte et plus vive que celle qu’elle éprouvait elle-même, le força de changer de place et d’essayer de s’en distraire. Il reprit ses filets et les jeta de nouveau, mais il ne put rien prendre; il était distrait. Ses yeux ne pouvaient pas se détacher de ceux de Valentine; soit qu’il se penchât sur l’escarpement de la rivière, soit qu’il se hasardât sur les pierres tremblantes ou sur les grès polis et glissants, il surprenait toujours le regard de Valentine Lire la suite...

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