Las ! cettui jour, pourquoi l'ai-je dû voir, Puisque ses yeux allaient ardre mon âme ? Doncques, Amour, faut-il que par ta flamme Soit transmué notre heur en désespoir !
Tant que mes yeux pourront larmes épandre A l'heur passé avec toi regretter, Et qu'aux sanglots et soupirs résister Pourra ma voix, et un peu faire entendre ;
Quand vous lirez, ô Dames Lyonnoises, Ces miens écrits pleins d'amoureuses noises, Quand mes regrets, ennuis, dépits et larmes M'orrez chanter en pitoyables carmes, Ne veuillez point condamner ma simplesse, Et jeune erreur de ma folle jeunesse, Si c'est erreur. Mais qui dessous les Cieux
Oh ! si j'étais en ce beau sein ravie De celui-là pour lequel vais mourant ; Si avec lui vive le demeurant De mes courts jours ne m'empêchait envie ;
Ô longs désirs, ô espérances vaines, Tristes soupirs et larmes coutumières A engendrer de moi maintes rivières, Dont mes deux yeux sont sources et fontaines !
Ô doux regards, ô yeux pleins de beauté, Petits jardins pleins de fleurs amoureuses Où sont d'Amour les flèches dangereuses, Tant à vous voir mon oeil s'est arrêté !
Ô beaux yeux bruns, ô regards détournés Ô chauds soupirs, ô larmes épandues, Ô noires nuits vainement attendues Ô jours luisants vainement retournés !
Ne reprenez, Dames, si j'ai aimé, Si j'ai senti mille torches ardentes, Mille travaux, mille douleurs mordantes, Si en pleurant j'ai mon temps consumé,
Depuis qu'Amour cruel empoisonna Premièrement de son feu ma poitrine, Toujours brûlai de sa fureur divine, Qui un seul jour mon coeur n'abandonna.
Deux ou trois fois bienheureux le retour De ce clair Astre, et plus heureux encore Ce que son oeil de regarder honore. Que celle-là recevrait un bon jour,