Poésie Joachim Du Bellay

Recueils de poèmes

Les Regrets

La terre y est fertile, amples les édifices,
Les poêles bigarrés, et les chambres de bois,
La police immuable, immuables les lois,
Et le peuple ennemi de forfaits et de vices.
Ils boivent nuit et jour en Bretons et Suisses,
Ils sont gras et refaits, et mangent plus que trois
Voilà les compagnons et correcteurs des rois,
Que le bon Rabelais a surnommés saucisses.

Ils n’ont jamais changé leurs habits et façons,
Ils hurlent comme chiens leurs barbares chansons,

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Ami, je t’apprendrai (encore que tu sois,
Pour te donner conseil, de toi-même assez sage)
Comme jamais tes vers ne te feront outrage,
Et ce qu’en tes écrits plus éviter tu dois.
Si de Dieu ou du roi tu parles quelquefois,
Fais que tu sois prudent et sobre en ton langage:
Le trop parler de Dieu porte souvent dommage,
Et longues sont les mains des princes et des rois.
Ne t’attache à qui peut, si sa fureur l’allume,

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Baif, qui, comme moi, prouves l’adversité,
Il n’est pas toujours bon de combattre l’orage,
Il faut caler la voile, et de peur du naufrage
Céder à la fureur de Neptune irrité.

Mais il ne faut aussi par crainte et vilité
S’abandonner en proie : il faut prendre courage,
Il faut feindre souvent l’espoir par le visage,
Et faut faire vertu de la nécessité.
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Après avoir longtemps erré sur le rivage
Où l’on voit lamenter tant de chétifs de cour,
Tu as atteint le bord où tout le monde court,
Fuyant de pauvreté le pénible servage.

Nous autres cependant, le long de cette plage,
En vain tendons les mains vers le nautonnier sourd,
Qui nous chasse bien loin ; car, pour le faire court,
Nous n’avons un quatrain pour payer le naulage.

Ainsi donc tu jouis du repos bienheureux,
Et comme font là-bas ces doctes amoureux,
Bien avant dans un bois te perds avec ta dame :

Tu bois le long oubli de tes travaux passés,
Sans plus penser en ceux que tu as délaissés,
Criant dessus le port ou tirant à la rame.

 

Un poème de Joachim Du Bellay

Qu’heureux tu es, Baïf, heureux, et plus qu’heureux,
De ne suivre abusé cette aveugle déesse,
Qui d’un tour inconstant et nous hausse et nous baisse,
Mais cet aveugle enfant qui nous fait amoureux!

Tu n’éprouves, Baïf, d’un maître rigoureux
Le sévère sourcil: mais la douce rudesse
D’une belle, courtoise et gentille maîtresse,
Qui fait languir ton coeur doucement langoureux.
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Si tu veux vivre en cour, Dilliers, souvienne-toi
De t’accoster toujours des mignons de ton maître,
Si tu n’es favori, faire semblant de l’être,
Et de t’accommoder aux passe-temps du roi.
Souvienne-toi encor de ne prêter ta foi
Au parler d’un chacun: mais surtout sois adextre,
Dextre A t’aider de la gauche autant que de la dextre,
Et par les moeurs d’autrui à tes moeurs donne loi.
N’avance rien du tien, Dilliers, que ton service,
Ne montre que tu sois trop ennemi du vice,

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Si tu ne sais, Morel, ce que je fais ici,
Je ne fais pas l’amour ni autre tel ouvrage:
Je courtise mon maître, et si fais davantage,
Ayant de sa maison le principal souci.

Mon Dieu (ce diras-tu), quel miracle est-ce ci,
Que de voir Du Bellay se mêler du ménage
Et composer des vers en un autre langage?
Les loups et les agneaux s’accordent tout ainsi.
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Si l’importunité d’un créditeur me fâche,
Les vers m’ôtent l’ennui du fâcheux créditeur:
Et si je suis fâché d’un fâcheux serviteur,
Dessus les vers, Boucher, soudain je me défâche.

Si quelqu’un dessus moi sa colère délâche,
Sur les vers je vomis le venin de mon coeur:
Et si mon faible esprit est recru du labeur,
Les vers font que plus frais je retourne à ma tâche.
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Celui qui d’amitié a violé la loi,
Cherchant de son ami la mort et vitupère:
Celui qui en procès a ruiné son frère,
Ou le bien d’un mineur a converti à soi:
Celui qui a trahi sa patrie et son roi,
Celui qui comme Oedipe a fait mourir son père,
Celui qui comme Oreste a fait mourir sa mère,
Celui qui a nié son baptême et sa foi:

Marseille, il ne faut point que pour la pénitence
D’une si malheureuse abominable offense,

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Bizet, j’aimerais mieux faire un boeuf d’un fourmi,
Ou faire d’une mouche un indique éléphant,
Que, le bonheur d’autrui par mes vers étouffant,
Me faire d’un chacun le public ennemi.
Souvent pour un bon mot on perd un bon ami,
Et tel par ses bons mots croit (tant il est enfant)
S’être mis sur la tête un chapeau triomphant,
A qui mieux eût valu être bien endormi.
La louange, Bizet, est facile à chacun,
Mais la satire n’est un ouvrage commun:
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