J’ai toujours combattu de tristes rêveries,
La clarté d’un tison dans une obscurité
M’a fait à l’impourvu paraître des Furies.
Près de moi la Discorde, et l’Infidélité
Montraient leur violence en mille barbaries,
Et de sang épandu, partout leur cruauté
Souillait l’argent de l’onde, et l’émail des prairies.
Troublé de ces horreurs je ne sais que penser,
Si ce n’est que le ciel me veuille menacer
Qui d’un mouvement déréglé
Sous des fers éclatants te veut rendre asservie,
Et d’un sage conseil rejette le poison
Qui pourrait nous ôter la vie,
Nous ayant ôté la raison.
Considère qu’Amour avecque des appas
Nous veut déguiser mon trépas
En t’offrant en victime aux plus beaux yeux du monde,
Et qu’entrer au dédale où tu vas t’égarant
Et n’ayant fait longtemps que dormir et manger,
Souffrir mille rigueurs d’un secours étranger
Pour quitter l’ignorance en quittant la faiblesse :
Après, servir longtemps une ingrate Maîtresse
Qu’on ne peut acquérir, qu’on ne peut obliger ;
Ou qui d’un naturel inconstant et léger,
Donne fort peu de joie et beaucoup de tristesse.
Cabaler dans la Cour ; puis devenu grison,
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Frêle Démon, morne prince des Songes,
Qui n’entretiens l’âme que de mensonges,
Si c’est de toi de qui je dois tenir
Tout le bonheur qui me doit advenir,
Si ton pouvoir d’une erreur favorable
Peut adoucir l’ennui d’un misérable,
Si la froideur et l’ombre du sommeil
Ont la vertu de produire un soleil,
De cent pavots je te fais sacrifice ;
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Et déjà ses coursiers abordaient la marine,
Quand Élise passa dans un char qui brillait
De la seule splendeur de sa beauté divine.
Mille appas éclatants qui font un nouveau jour
Et qui sont couronnés d’une grâce immortelle,
Les rayons de la gloire et les feux de l’amour
Éblouissaient la vue et brûlaient avec elle.
Je regardais coucher le bel astre des cieux,
Lorsque ce grand éclat me vint frapper les yeux,
une pièce de théâtre pour représenter à la campagne, et se voyant
pressé de leur écrire le sujet qu’il avait choisi pour cette comédie,
à laquelle il n’avait point pensé, leur envoya les vers qui suivent.
Puisqu’il vous plaît que je vous die
Le sujet de la comédie
Que je médite pour vos soeurs ;
Les images m’en sont présentes,
Les personnages sont des fleurs
Car vous êtes des fleurs naissantes.
Toute pleine d’horreur, de carnage et de bruit,
Où l’inhumanité d’une orgueilleuse armée
Triomphe insolemment d’un empire détruit.
Faites-moi voir encore une flotte abîmée
Par le plus fâcheux temps que l’orage ait produit,
Où de cent mille voix, dans la plus noire nuit,
La clémence du Ciel soit en vain réclamée.
Ouvrez-moi les enfers ; montrez-moi tout de rang
Cent ravages de flammes et cent fleuves de sang,
Baiser, dont jusqu’au coeur le sentiment me touche,
Enfant délicieux de la plus belle bouche
Qui jamais prononça les Oracles d’Amour.
Mais tout mon sang s’altère, une brûlante fièvre
Me ravit la couleur et m’ôte la raison ;
Cieux ! j’ai pris à la fois sur cette belle lèvre
D’un céleste Nectar et d’un mortel poison.
Ah ! mon Ame s’envole en ce transport de joie !
Ce gage de salut, dans la tombe m’envoie ;
Les incommodités que la vieillesse apporte.
Déjà la pâle mort, pour me faire partir,
D’un pied sec et tremblant vient frapper à ma porte.
Ainsi que le soleil sur la fin de son cours
Paraît plutôt tomber que descendre dans l’Onde ;
Lorsque l’homme a passé les plus beaux de ses jours
D’une course rapide il passe en l’autre Monde.
Il faut éteindre en nous tous frivoles désirs,
Il faut nous détacher des terrestres plaisirs
Adoucist quelquefois ton courage irrité,
Suisse, rabats un peu de ta severité,
Et permets ce matin que i’aille voir Madame.
Deux flacons d’un muscat qui touche jusqu’à l’ame
Seront le prix certain de ta civilité ;
Mais il ferme la porte auec brutalité,
En vain je le conjure, en vain je le reclame.
Si ce lieu m’est tousjours de si fascheux accez,
Je ne puis esperer aucun heureux succez,