Dom Juan ou le Festin de pierre

ACTE IV, Scène VII

DOM JUAN, SGANARELLE, Suite.

DOM JUAN: Sais-tu bien que j’ai encore senti quelque peu d’émotion pour elle, que j’ai trouvé de l’agrément dans cette nouveauté bizarre, et que son habit négligé, son air languissant et ses larmes ont réveillé en moi quelques petits restes d’un feu éteint ?

SGANARELLE: C’est-à-dire que ses paroles n’ont fait aucun effet sur vous.

DOM JUAN: Vite à souper.

SGANARELLE: Fort bien.

DOM JUAN, se mettant à table: Sganarelle, il faut songer à s’amender pourtant.

SGANARELLE: Oui-da !

DOM JUAN: Oui, ma foi ! Il faut s’amender; encore vingt ou trente ans de cette vie-ci, et puis nous songerons à nous.

SGANARELLE: Oh !

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ACTE IV, Scène VIII

DOM JUAN, LA STATUE DU COMMANDEUR, qui vient se mettre à table, SGANARELLE, Suite.

DOM JUAN: Une chaise et un couvert, vite donc. (à Sganarelle.) Allons, mets-toi à table.

SGANARELLE: Monsieur, je n’ai plus de faim.

DOM JUAN: Mets-toi là, te dis-je. à boire. à la santé du Commandeur: je te la porte, Sganarelle. Qu’on lui donne du vin.

SGANARELLE: Monsieur, je n’ai pas soif.

DOM JUAN: Bois, et chante ta chanson, pour régaler le Commandeur.

SGANARELLE: Je suis enrhumé, Monsieur.

DOM JUAN: Il n’importe. Allons. Vous autres, venez, accompagnez sa voix.

LA STATUE: Dom Juan, c’est assez. Je vous invite à venir demain souper avec moi. En aurez-vous le courage ?

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ACTE V, Scène première

DOM LOUIS, DOM JUAN, SGANARELLE.

DOM LOUIS: Quoi ? mon fils, serait-il possible que la bonté du Ciel eût exaucé mes vœux ? Ce que vous me dites est-il bien vrai ? Ne m’abusez-vous point d’un faux espoir, et puis-je prendre quelque assurance sur la nouveauté surprenante d’une telle conversion ?

DOM JUAN, faisant l’hypocrite: Oui, vous me voyez revenu de toutes mes erreurs; je ne suis plus le même d’hier au soir, et le Ciel tout d’un coup a fait en moi un changement qui va surprendre tout le monde: il a touché mon âme et dessillé mes yeux, et je regarde avec horreur le long aveuglement où j’ai été, et les désordres criminels de la vie que j’ai menée. J’en repasse dans mon esprit toutes les abominations, et m’étonne comme le Ciel les a pu souffrir si longtemps, et n’a pas vingt fois sur ma tête laissé tomber les coups de sa justice redoutable. Je vois les grâces que sa bonté m’a faites en ne me punissant point de mes crimes; et je prétends en profiter comme je dois, faire éclater aux yeux du monde un soudain changement de vie, réparer par là le scandale de mes actions passées, et m’efforcer d’en obtenir du Ciel une pleine rémission. C’est à quoi je vais travailler; et je vous prie, Monsieur, de vouloir bien contribuer à ce dessein, et de m’aider vous-même à faire choix d’une personne qui me serve de guide, et sous la conduite de qui je puisse marcher sûrement dans le chemin où je m’en vais entrer.

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ACTE V, Scène II

DOM JUAN, SGANARELLE.

SGANARELLE: Ah ! Monsieur, que j’ai de joie de vous voir converti ! Il y a longtemps que j’attendais cela, et voilà, grâce au Ciel, tous mes souhaits accomplis.

DOM JUAN: La peste le benêt !

SGANARELLE: Comment, le benêt ?

DOM JUAN: Quoi ? tu prends pour de bon argent ce que je viens de dire, et tu crois que ma bouche était d’accord avec mon cœur ?

SGANARELLE: Quoi ? ce n’est pas. Vous ne. Votre. Oh ! quel homme ! quel homme ! quel homme !

DOM JUAN: Non, non, je ne suis point changé, et mes sentiments sont toujours les mêmes.

SGANARELLE: Vous ne vous rendez pas à la surprenante merveille de cette statue mouvante et parlante ?

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ACTE V, Scène III

DOM CARLOS, DOM JUAN, SGANARELLE.

DOM CARLOS: Dom Juan, je vous trouve à propos, et suis bien aise de vous parler ici plutôt que chez vous, pour vous demander vos résolutions. Vous savez que ce soin me regarde, et que je me suis en votre présence chargé de cette affaire. Pour moi, je ne le cèle point, je souhaite fort que les choses aillent dans la douceur; et il n’y a rien que je ne fasse pour porter votre esprit à vouloir prendre cette voie, et pour vous voir publiquement confirmer à ma sœur le nom de votre femme.

DOM JUAN, d’un ton hypocrite: Hélas ! je voudrais bien, de tout mon cœur, vous donner la satisfaction que vous souhaitez; mais le Ciel s’y oppose directement: il a inspiré à mon âme le dessein de changer de vie, et je n’ai point d’autres pensées maintenant que de quitter entièrement tous les attachements du monde, de me dépouiller au plus tôt de toutes sortes de vanités, et de corriger désormais par une austère conduite tous les déréglements criminels où m’a porté le feu d’une aveugle jeunesse.
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ACTE V, Scène IV

DOM JUAN, SGANARELLE.

SGANARELLE: Monsieur, quel diable de style prenez-vous là ? Ceci est bien pis que le reste, et je vous aimerais bien mieux encore comme vous étiez auparavant. J’espérais toujours de votre salut; mais c’est maintenant que j’en désespère; et je crois que le Ciel, qui vous a souffert jusques ici, ne pourra souffrir du tout cette dernière horreur.

DOM JUAN: Va, va, le Ciel n’est pas si exact que tu penses; et si toutes les fois que les hommes.

SGANARELLE: Ah ! Monsieur, c’est le Ciel qui vous parle, et c’est un avis qu’il vous donne.

DOM JUAN: Si le Ciel me donne un avis, il faut qu’il parle un peu plus clairement, s’il veut que je l’entende.

ACTE V, Scène IV

Dom Juan ou le Festin de pierre écrit par Molière sous la protection de Louis XIV

La pièce de Théâtre Dom Juan ou le Festin de pierre par Molière

Dom Juan – ACTE V, Scène V

DOM JUAN, UN SPECTRE en femme voilée, SGANARELLE.

LE SPECTRE, en femme voilée: Dom Juan n’a plus qu’un moment à pouvoir profiter de la miséricorde du Ciel; et s’il ne se repent ici, sa perte est résolue.

SGANARELLE: Entendez-vous, Monsieur ?

DOM JUAN: Qui ose tenir ces paroles ? Je crois connaître cette voix.

SGANARELLE: Ah ! Monsieur, c’est un spectre: je le reconnais au marcher.

DOM JUAN: Spectre, fantôme, ou diable, je veux voir ce que c’est.

Le Spectre change de figure, et représente le temps avec sa faux à la main.

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Dom Juan – ACTE V, Scène VI

LA STATUE, DOM JUAN, SGANARELLE.

LA STATUE: Arrêtez, Dom Juan: vous m’avez hier donné parole de venir manger avec moi.

DOM JUAN: Oui. Où faut-il aller ?

LA STATUE: Donnez-moi la main.

DOM JUAN: La voilà.

LA STATUE: Dom Juan, l’endurcissement au péché traîne une mort funeste, et les grâces du Ciel que l’on renvoie ouvrent un chemin à sa foudre.

DOM JUAN: O Ciel ! que sens-je ? Un feu invisible me brûle, je n’en puis plus, et tout mon corps devient un brasier ardent. Ah !

Le tonnerre tombe avec un grand bruit et de grands éclairs sur Dom Juan; la terre s’ouvre et l’abîme; et il sort de grands feux de l’endroit où il est tombé.

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