Cinq Semaines en ballon

Chapitre XXI

La nuit se faisait très obscure. Le docteur n’avait pu reconnaître le pays; il s’était accroché à un arbre fort élevé, dont il distinguait à peine la masse confuse dans l’ombre. Suivant son habitude, il prit le quart de neuf heures, et à minuit Dick vint le remplacer.

” Veille bien, Dick ! veille avec grand soin.

— Est-ce qu’il y a quelque chose de nouveau ?

— Non ! cependant j’ai cru surprendre de vagues rumeurs au-dessous de nous; je ne sais trop où le vent nous a portés; un excès de prudence ne peut pas nuire.
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Chapitre XXII

Fergusson projeta vers les divers points de l’espace son puissant rayon de lumière et l’arrêta sur un endroit où des cris d’épouvante se firent entendre. Ses deux compagnons y jetèrent un regard avide.

Le baobab au-dessus duquel se maintenait le Victoria presque immobile s’élevait au centre d’une clairière; entre des champs de sésame et de cannes à sucre, on distinguait une cinquantaine de huttes basses et coniques autour desquelles fourmillait une tribu nombreuse. Lire la suite...

Chapitre XXIII

Une nuit magnifique s’étendait sur la terre. Le prêtre s’endormit dans une prostration paisible.

” Il n’en reviendra pas, dit Joe ! Pauvre jeune homme ! trente ans à peine !

— Il s’éteindra dans nos bras ! dit le docteur avec désespoir. Sa respiration déjà si faible s’affaiblit encore, et je ne puis rien pour le sauver !

— Les infâmes gueux ! s’écriait Joe, que ces subites colères prenaient de temps à autre. Et penser que ce digne prêtre a trouvé encore des paroles pour les plaindre, pour les excuser, pour leur pardonner ! Lire la suite...

Chapitre XXIV

Le Victoria, accroché à un arbre solitaire et presque desséché, passa la nuit dans une tranquillité parfaite; les voyageurs purent goûter un peu de ce sommeil dont ils avaient si grand besoin; les émotions des journées précédentes leur avaient laissé de tristes souvenirs.

Vers le matin, le ciel reprit sa limpidité brillante et sa chaleur. Le ballon s’éleva dans les airs; après plusieurs essais infructueux, il rencontra un courant, peu rapide d’ailleurs, qui le porta vers le nord-ouest.

” Nous n’avançons plus, dit le docteur; si je ne me trompe, nous avons accompli la moitié de notre voyage à peu près en dix jours; mais, au train dont nous marchons, il nous faudra des mois pour le terminer. Cela est d’autant plus fâcheux que nous sommes menacés de manquer d’eau.

— Mais nous en trouverons, répondit Dick; il est impossible de ne pas rencontrer quelque rivière, quelque ruisseau, quelque étang, dans cette vaste étendue de pays.

— Je le désire.
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Chapitre XXV

Le lendemain, même pureté du ciel, même immobilité de l’atmosphère. Le Victoria s’éleva jusqu’à une hauteur de cinq cents pieds; mais c’est à peine s’il se déplaça sensiblement dans l’ouest.

” Nous sommes en plein désert, dit le docteur. Voici l’immensité de sable ! Quel étrange spectacle ! Quelle singulière disposition de la nature ! Pourquoi là-bas cette végétation excessive, ici cette extrême aridité, et cela, par la même latitude, sous les mêmes rayons de soleil ?

— Le pourquoi, mon cher Samuel, m’inquiète peu, répondit Kennedy; la raison me préoccupe moins que le fait. Cela est ainsi, voilà l’important.

— Il faut bien philosopher un peu, mon cher Dick; cela ne peut pas faire de mal.

— Philosophons, je le veux bien; nous en avons le temps; à peine si nous marchons. Le vent a peur de souffler, il dort.
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Chapitre XXVI

La route parcourue par le Victoria pendant la journée précédente n’excédait pas dix milles, et, pour se maintenir, on avait dépensé cent soixante-deux pieds cubes de gaz.

Le samedi matin, le docteur donna le signal du départ.

” Le chalumeau ne peut plus marcher que six heures, dit-il. Si dans six heures nous n’avons découvert ni un puits, ni une source, Dieu seul sait ce que nous deviendrons.

— Peu de vent ce matin, maître ! dit Joe, mais il se lèvera peut-être, ajouta-t-il en voyant la tristesse mal dissimulée de Fergusson. ”

Vain espoir ! Il faisait dans l’air un calme plat, un de ces calmes qui dans les mers tropicales enchaînent obstinément les navires. La chaleur devint intolérable, et le thermomètre à l’ombre, sous la tente, marqua cent treize degrés .
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Chapitre XXVII

Le premier soin du docteur fut, le lendemain, de consulter le baromètre. C’est à peine si la colonne de mercure avait subi une dépression appréciable.

” Rien ! se dit-il, rien ! ”

Il sortit de la nacelle, et vint examiner le temps; même chaleur, même dureté, même implacabilité.

” Faut-il donc désespérer ? ” s’écria-t-il.

Joe ne disait mot, absorbé dans sa pensée, et méditant son projet d’exploration.
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Chapitre XXVIII

La soirée fut charmante et se passa sous de frais ombrages de mimosas, après un repas réconfortant; le thé et le grog n’y furent pas ménagés.

Kennedy avait parcouru ce petit domaine dans tous les sens, il en avait fouillé les buissons; les voyageurs étaient les seuls êtres animés de ce paradis terrestre; ils s’étendirent sur leurs couvertures et passèrent une nuit paisible, qui leur apporta l’oubli des douleurs passées.

Le lendemain, 7 mai, le soleil brillait de tout son éclat, mais ses rayons ne pouvaient traverser l’épais rideau d’ombrage. Comme il avait des vivres en suffisante quantité, le docteur résolut d’attendre en cet endroit un vent favorable.

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Chapitre XXIX

Depuis le moment de leur départ, les voyageurs marchèrent avec une grande rapidité; il leur tardait de quitter ce désert, qui avait failli leur être si funeste.

Vers neuf heures un quart du matin, quelques symptômes de végétation furent entrevus, herbes flottant sur cette mer de sable et leur annonçant, comme à Christophe Colomb, la proximité de la terre; des pousses vertes pointaient timidement entre des cailloux qui allaient eux-mêmes redevenir les rochers de cet océan.

Des collines encore peu élevées ondulaient à l’horizon; leur profil, estompé par la brume, se dessinait vaguement; la monotonie disparaissait. Lire la suite...

Chapitre XXX

Le lendemain, 11 mai, le Victoria reprit sa course aventureuse; les voyageurs avaient en lui la confiance d’un marin pour son navire.

D’ouragans terribles, de chaleurs tropicales, de départs dangereux, de descentes plus dangereuses encore, il s’était partout et toujours tiré avec bonheur. On peut dire que Fergusson le guidait d’un geste; aussi, sans connaître le point d’arrivée, le docteur n’avait plus de craintes sur l’issue du voyage. Seulement, dans ce pays de barbares et de fanatiques, la prudence l’obligeait à prendre les plus sévères précautions; il recommanda donc à ses compagnons d’avoir l’œil ouvert à tout venant et à toute heure.

Le vent les ramenait un peu plus au nord, et vers neuf heures, ils entrevirent la grande ville de Mosfeia, bâtie sur une éminence encaissée elle-même entre deux hautes montagnes; elle était située dans une position inexpugnable; une route étroite entre un marais et un bois y donnait seule accès. Lire la suite...

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