Stèle provisoire

Dans  Poésies Victor Segalen,  Stèles
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Ce n’est point dans ta peau de pierre, insensible, que ceci
aimerait à pénétrer ; ce n’est point vers l’aube fade, informe
et crépusculaire, que ceci, laissé libre, voudrait s’orienter ;

Ce n’est pas pour un lecteur littéraire, même en faveur d’un
calligraphe, que ceci a tant de plaisir à être dit :

Mais pour Elle.

*

Vienne un jour Elle passe par ici. Droite et grande et face
à toi, qu’elle lise de ses yeux mouvants et vivants, protégés
de cils dont je sais l’ombre ;

Qu’elle mesure ces mots avec des lèvres tissées de chair (dont
je n’ai pas perdu le goût), avec sa langue nourrie de baisers,
avec ses dents dont voici toujours la trace,

Qu’elle tremble à fleur d’haleine, – moisson souple sous le
vent tiède, – propageant des seins aux genoux le rythme propre
de ses flancs – que je connais,

*

Alors, ce déduit, enjambant l’espace et dansant sur ses cadences ;
ce poème, ce don et ce désir, –

Tout d’un coup s’écorchera de ta pierre morte, oh ! précaire et
provisoire, – pour s’abandonner à sa vie,

Pour s’en aller vivre autour d’Elle.

 

Un poème de Victor Segalen

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 Poésies Victor Segalen - Stèles - Stèle provisoire -  Ce n'est point dans ta peau de pierre, insensible, que ceci aimerait à pénétrer ; ce n'est point vers l'aube fade, informe


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